En 1877, la succession Joseph Masson entreprend des travaux qui modifient la façade de cet immeuble et lui donnent l’apparence d’un magasin-entrepôt. Ses propriétaires poursuivent ainsi un processus de transformation physique et fonctionnelle en cours depuis des décennies. L’évolution de l’immeuble compte en effet quatre moments forts. D’abord, de 1769-1770 jusqu’aux années 1820, la fonction résidentielle domine, avec la présence d’une maison de deux étages, dotée d’une grande cour avec des dépendances. Puis, de 1820 à 1844, cette maison est agrandie et le commerce s’étend progressivement vers la cour arrière où de nouveaux bâtiments de pierre sont construits pour loger les magasins, bureaux et entrepôts des négociants Robertson, Masson & Co. Une nouvelle étape est franchie en 1845, lorsque le propriétaire, Joseph Masson, adapte sa propriété à des fins locatives. Une nouvelle façade de pierre de taille est construite et l’immeuble prend les caractéristiques des maisons-magasins, avec des magasins au rez-de-chaussée et des appartements à l’étage. Après le décès de Masson en 1847, sa succession poursuit l’adaptation du site et de l’immeuble aux besoins du commerce. La fonction résidentielle disparaît, les espaces réservés à l’entreposage et à la vente augmentent, la cour arrière est de plus en plus réduite. Enfin, en 1877, la maison-magasin devient un magasin-entrepôt. L’intérieur est refait pour éliminer l’étage sous les combles et donner aux lieux de vente des dimensions plus imposantes. Au même moment, grâce à l’architecte Henri-Maurice Perrault, la façade en pierre de taille est remplacée par un ensemble d’éléments en fonte, des pilastres du rez-de-chaussée jusqu’à la corniche.
Le premier occupant du « nouveau » magasin-entrepôt est la société Bernard Frères, importateurs et grossistes en dry goods (tissus, articles de mercerie et peut-être d’autres produits), présente de 1872 et à 1879. De 1880 à 1914, l’immeuble accueille le plus souvent au moins deux locataires commerciaux. Parmi les occupants les plus significatifs, on constate la présence de commerçants et de fabricants de meubles et d’ornements d’église. En 1909, le bâtiment fait l’objet de travaux importants, sous la direction de l’architecte Eugène Payette, qui visent probablement à accroître la volumétrie de la partie arrière et à mieux intégrer ces espaces. En 1914, Alfred Lambert Limitée, un manufacturier de chaussures, établit ses bureaux, salles de montre et entrepôts dans le magasin-entrepôt. Il en devient l’unique occupant en 1915. La présence d’un nouveau locataire prestigieux explique peut-être les travaux entrepris en 1922. Un troisième étage et un parapet sont alors ajoutés à la façade de l’immeuble. Les dimensions des ouvertures et les éléments décoratifs s’harmonisent avec la façade de 1877, mais on préfère maintenant la pierre à la fonte. Pendant l’entre-deux guerres, A. Lambert Ltée étend progressivement ses activités à des immeubles voisins au sud, rue De Brésoles. Lorsque la compagnie quitte en 1944, les lieux sont occupés par Defoy et Legault, importateurs et distributeurs de jouets et autres menus articles (small wares). Cette entreprise acquiert l’immeuble en 1965 et y demeure jusqu’au début des années 1980. Après le départ de celle-ci, le bâtiment demeure inoccupé et devrait incessamment faire l’objet d’un nouvel usage. |